Dans le lieu de travail moderne, on accorde de plus en plus d’attention à la diversité, y compris aux différences de traits de personnalité comme l’introversion. Pourtant, nous remarquons lors de nos présentations et ateliers qu’il existe encore de nombreux tabous inconscients sur les collaborateurs introvertis et ambivertis. Si vous n’êtes pas un ‘ boute-en-train ’ spontané ou si vous ne faites pas entendre votre voix immédiatement, vous courez le risque d’être négligé(e) pour des promotions ou des projets importants.
C’est dommage, car les collaborateurs introvertis constituent une part importante de la population — environ 30 %. Leurs forces et perspectives uniques offrent une énorme valeur ajoutée aux organisations, à condition qu’ils reçoivent l’espace et le soutien nécessaires pour s’épanouir. Ignorer ces qualités signifie laisser passer des opportunités.
Qu’est-ce que l’introversion ?
L’introversion n’est pas un manque de compétences sociales ni un problème à résoudre. C’est un trait de personnalité où les personnes tirent leur énergie du calme, de l’introspection et du temps passé seules, plutôt que des stimuli externes. Les personnes introverties communiquent souvent calmement et de manière réfléchie.
Outre les personnes introverties et extraverties, il y a aussi les personnes ambiverties (environ 60 % de la population). Les personnes ambiverties se situent entre l’introversion et l’extraversion. Selon la situation, la compagnie ou le contexte, elles présentent des caractéristiques des deux.
Les forces et le pouvoir des collaborateurs introvertis au travail
Les collègues introvertis apportent une série de qualités uniques qui peuvent renforcer une organisation :
- Réflexion approfondie et analyse : ils prennent le temps d’examiner les questions complexes sous tous les angles, ce qui conduit à des décisions réfléchies et à des contributions précieuses lors des brainstormings.
- Compétences d’écoute : leur capacité à écouter activement aide à comprendre les besoins des collègues et des clients.
- Créativité et innovation : beaucoup ont souvent un monde intérieur riche et une approche unique des défis, ce qui peut conduire à des solutions innovantes.
- Forte concentration et autonomie : ils travaillent souvent de manière concentrée et efficace, surtout dans des environnements où ils peuvent travailler sans interruptions ni surstimulation. Ils peuvent aussi très bien travailler de manière indépendante et autonome. Le piège ici est que passer 100 % de son temps seul (comme nous l’avons vécu avec la COVID-19) n’est pas non plus bénéfique et peut engendrer la solitude. Il est donc important de chercher ensemble un bon équilibre entre collaboration et travail individuel.
- Empathie et conscience de soi : ils sont souvent capables de créer des connexions fortes et authentiques avec les autres et excellent dans les situations exigeant une intelligence émotionnelle. Cela en fait souvent de précieux joueurs d’équipe et d’excellents bâtisseurs de ponts.
Leurs défis et comment les atténuer
Bien que les personnes introverties soient tout aussi capables et apportent des contributions précieuses que leurs collègues extravertis, leurs qualités ne sont pas toujours reconnues ou valorisées dans les environnements de travail traditionnels axés sur le comportement extraverti. Elles se heurtent donc à des obstacles qui les empêchent d’exploiter leur plein potentiel. Quelques défis courants sont :
- Surstimulation dans les environnements animés : les bureaux paysagers (open spaces), l’interaction constante, le team building et d’autres situations riches en stimuli et interactions sociales peuvent être très fatigants. Offrir des espaces de travail calmes, le télétravail, un bureau séparé ou des casques anti-bruit peut aider. Prévoyez également du temps seul ou du temps de concentration pour les collaborateurs introvertis, afin qu’ils puissent se ressourcer en étant seuls.
- Moins de visibilité : Les introvertis font souvent moins activement la promotion d’eux-mêmes et de leur travail, ce qui peut conduire à une sous-évaluation de leurs performances. Mais aussi le fait de manquer des promotions, voire des promotions accordées uniquement à leurs collègues extravertis qui étaient beaucoup plus loquaces à ce sujet, même s’il s’agissait d’un effort partagé. Des check-ins réguliers, des récompenses d’équipe et la reconnaissance de leurs contributions sont cruciaux.
- Vitesse de traitement plus lente : souvent, ils ont aussi besoin de plus de temps pour donner un feedback ad hoc et prendre des décisions. Partager l’information à l’avance et prévoir du temps de préparation lors des réunions imprévues pour réfléchir peuvent les aider.
- Le comportement extraverti comme norme au travail : dans les environnements de travail traditionnels, persiste souvent l’idée que celui qui s’exprime rapidement et aisément est un expert dans son domaine. Il est aussi difficile de montrer son expertise en tant que personne introvertie si on ne vous en donne pas l’espace, si on vous interrompt ou si on ne vous le demande pas. De plus, persiste souvent l’idée qu’un leader doit afficher un comportement extraverti. Pensez à parler avec aisance, aimer les activités sociales, réseauter beaucoup, parler beaucoup avec les membres de son équipe, … Par conséquent, les collaborateurs introvertis sont souvent négligés lorsqu’il s’agit de promotion à un poste de direction. En tant que manager, il est donc de votre devoir de bien connaître chacun dans votre équipe, quelles sont leurs forces et contributions à l’équipe. Et aussi oser penser “out-of-the-box” que votre membre d’équipe introverti pourrait bien être le meilleur candidat.
Comment soutenir les collaborateurs introvertis ?
Un lieu de travail (neuro-)inclusif offre de l’espace pour différents types de personnalité, y compris les introvertis. Voici quelques manières de les soutenir :
- Créez des espaces de travail flexibles et calmes : Prévoyez des endroits calmes où les collaborateurs peuvent se concentrer. Mais aussi des endroits où les collaborateurs extravertis peuvent dépenser leur énergie.
- Définissez des attentes claires et communiquez de manière transparente : de cette manière, il est clair comment quelqu’un est évalué, comment obtenir une promotion et quels sont les objectifs de l’entreprise.
- Reconnaissez les performances individuelles : valorisez la contribution de chacun, même si elle est moins visible.
- Encouragez un environnement de travail hybride : Beaucoup d’introvertis se sentent à l’aise avec un mélange de télétravail et de travail au bureau.
- Favorisez des réunions inclusives et travaillez sur la sécurité psychologique dans l’équipe : donnez à chacun l’espace de partager son opinion, par exemple en partageant les ordres du jour à l’avance ou en demandant une contribution écrite préalable. N’interrompez pas non plus la personne lorsqu’elle essaie de se concentrer pour formuler son feedback ou sa décision.
- Respectez les limites personnelles : certains collaborateurs ont souvent besoin de plus de temps pour se ressourcer après des interactions sociales. Donnez-leur l’espace pour le faire. Respectez si le collègue demande à être laissé tranquille un moment ou à pouvoir terminer sa phrase. Comprenez que les teambuildings sociaux interactifs ne sont pas la manière de construire une équipe soudée. Cela se fait jour après jour en communiquant ouvertement et de manière transparente les uns avec les autres. Tenez donc également compte des limites personnelles lors des activités d’équipe. Ne forcez pas non plus les collaborateurs (neurodivergents) à être sociaux, à sortir de leur zone de confort ou à réseauter. Discutez toujours de ce qui est une activité réalisable pour chacun dans l’équipe (éventuellement avec les ajustements nécessaires).
Conclusion : construire un avenir inclusif
Exploiter la force des collaborateurs introvertis n’est pas un luxe, mais une nécessité pour les organisations qui veulent innover, accélérer ou croître. En investissant dans une culture de travail (neuro-)inclusive, où différentes personnalités peuvent s’épanouir, vous exploitez le plein potentiel de votre équipe.
Daphné De Troch a appris à créer un environnement de travail avec la sécurité psychologique présente et à diriger une équipe de personnes neurodivergentes après avoir reçu un diagnostic de TDAH et d’autisme. Elle a créé Bjièn avec Dietrich pour aider d’autres responsables et équipes à se sensibiliser à la neurodiversité et à faire en sorte que leur lieu de travail soit neuroinclusif. — Plus sur Daphné